Dans le cadre d’un débat sur l’avenir de la politique forestière en France, je suis intervenue au nom du groupe socialiste le 24 mai dernier au Sénat.
La forêt est un atout indéniable pour notre pays. Recouvrant près d’un tiers de notre territoire et ayant la particularité d’être multifonctionnelle, elle se trouve au carrefour d’enjeux multiples tant environnementaux, sociaux qu’économiques… Elle génère 450.000 emplois directs ou indirects en France et constitue un outils de choix dans la réalisation de nos objectifs en matière de réduction des émissions de CO2 et de développement des énergies renouvelables.
Pourtant, notre forêt est sous-exploitée. Notre filière-Bois connait de gros problèmes de structuration et le bois représente le deuxième poste du déficit commercial de notre économie (alors que la France dispose du troisième parc forestier de l’Union européenne).
A la veille de changements climatiques inévitables, d’épuisement de nos ressources naturelles et donc d’une modification profonde de nos modes de vie et de consommation, nous devons plus que jamais faire de notre engagement en faveur d’une forêt durable et responsable, une priorité !
C’est le sens que j’ai souhaité donner à mon intervention que je vous invite à consulter, ci-dessous.
Séance du 24 mai 2011 – Compte-rendu intégral des débats
Mme Renée Nicoux, au nom du groupe socialiste. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette année internationale des forêts, je me félicite que notre Haute Assemblée se penche sur cet enjeu crucial qu’est l’avenir de la politique forestière. En rapport avec ce qui vient d’être dit, j’ajouterai que peut-être la sécheresse aura-t-elle aussi des conséquences sur la forêt, comme cela s’est produit en d’autres moments.
La France possède le troisième parc forestier de l’Union européenne, avec plus de quinze millions d’hectares sur son territoire métropolitain et huit millions d’hectares outre-mer, ce qui représente presque un tiers du territoire. Cette situation est prégnante outre-mer, où le pourcentage du territoire occupé par la forêt est encore plus élevé, pour atteindre 96 % en Guyane.
Cet héritage inestimable est un atout indéniable pour notre pays. Aussi notre attitude en la matière doit-elle dépasser les clivages politiques. Notre politique forestière doit nécessairement s’inscrire dans le long terme et nécessiter une continuité de l’action publique. Il est de notre devoir de la valoriser, et cela d’autant plus dans la période actuelle. Nous sommes à l’aube d’un changement radical de nos modes de vie et de consommation. Les changements climatiques, l’épuisement de nos ressources, la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et le développement nécessaire des énergies renouvelables doivent nous pousser à repenser notre société.
Dans tous ces domaines, la forêt a un rôle à jouer, car elle est au carrefour d’enjeux multiples : des enjeux environnementaux, en tant que puits de carbone et élément de préservation de la biodiversité, enjeux sociaux, en tant que lieu de loisirs, de détente et de relation des citoyens avec la nature, enjeux économiques, à travers la richesse et les emplois qu’elle génère.
Pourtant, nous sommes obligés de constater que, malgré ses ressources importantes, notre pays est loin d’être l’un des leaders européens sur le marché du bois.
Certains considèrent que le potentiel de la forêt française est aujourd’hui sous-exploité et que sa gestion ne s’inscrit pas dans une logique durable. La forêt est tout simplement un « potentiel dormant » et la conséquence est sans appel : la filière bois est le deuxième poste de déficit commercial de notre économie alors que l’Allemagne, avec une superficie moindre, onze millions d’hectares contre plus de quinze millions d’hectares pour la France métropolitaine, est le deuxième exportateur de bois.
Depuis plusieurs années, les professionnels de la filière bois tirent la sonnette d’alarme. La nécessité de structurer cette filière et de se doter d’une véritable stratégie nationale dans ce domaine n’a jamais été aussi forte.
Pourtant, la France peine à le faire, et ce n’est pas par manque d’intérêt. Personne ne peut dire ici que les pouvoirs publics et les élus se désintéressent de la forêt, bien au contraire. Des Assises de la forêt aux discours d’Urmatt et d’Égletons, en passant par les nombreuses initiatives des parlementaires sur ce sujet et la multiplication des rapports, chacun semble avoir pris conscience de la nécessité de valoriser la forêt et d’inscrire l’action dans le long terme.
Mais c’est ici que réside l’un des problèmes : les débats sur l’avenir et les enjeux de la forêt sont toujours pavés de bonnes intentions, mais ils ne se concrétisent que trop rarement dans les faits.
À ce manque de concrétisation viennent s’ajouter une dégradation et un affaiblissement généralisé des services publics en charge de la politique forestière. Avec l’éclatement de l’administration des eaux et forêts en 1964, la disparition des directions départementales de l’agriculture et de la forêt, l’affaiblissement de la recherche forestière, les effets de la Révision générale des politiques publiques et le démantèlement de l’Office national des forêts, la situation est plus que préoccupante !
Si nous souhaitons une gestion durable de la forêt, les pouvoirs publics doivent maintenant traduire les discours en actes. En disant cela, je suis parfaitement consciente des difficultés qui existent pour structurer cette filière et je sais parfaitement que des initiatives très intéressantes se mettent en place un peu partout en France, au travers, par exemple, des plans pluriannuels régionaux de développement forestier. Mais force est de constater qu’aucune réelle stratégie nationale de la forêt ne permet actuellement de structurer ce secteur. Certaines décisions actuelles, notamment budgétaires, tendent même plutôt à affaiblir cette filière qu’à la renforcer.
Le débat que nous avons aujourd’hui doit donc nous amener à nous poser deux questions simples. Quelle est l’ambition de la France vis-à-vis de sa politique forestière et quelles sont les actions à mettre en œuvre sur le long terme pour les concrétiser ?
En premier lieu, (…)
[En savoir plus]